CHRONIQUES
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Du
temps où régnait la Super Nintendo
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Novembre 1990... Nintendo lance au Japon une console de légende dont d'innombrables joueurs ont gardé un souvenir impérissable. Une console idéale qui a traversé la constellation vidéo-ludique en y laissant une marque indélébile. Une console dont les six années d'existence sont connues comme étant les plus euphoriques, les plus riches et les plus séduisantes de l'histoire des jeux vidéo. Six ans où sont nées des références absolues, des titres à l'aune desquels on juge aujourd'hui la plupart des sorties. Ces six années-là, mon entourage consoleux et moi les avons vécues en joueurs acharnés, avides d'improbables manipulations de manettes, de RPG japonais aussi magnifiques qu'obscurs, de parties à plusieurs où prévalaient les litres de coca, les insultes, les exclamations de mauvaise foi et les lancers de paddle à travers la pièce. Mais il a fallu que chacun d'entre nous déserte la terre sainte de la SNIN pour aller lâchement se laisser tenter par l'aventure des nouvelles consoles, l'un optant pour Sony, l'autre pour Nintendo, un autre encore pour les deux (personne pour Sega, curieusement). Et il a fallu qu'on échange ou qu'on vende cette console qui nous avait donné tant d'années de bonheur. Et là tout a changé. Il y eut certes le choc technologique, la qualité des jeux Namco, l'inimitable profondeur des jeux Nintendo, l'arrivée inopinée de SquareSoft dans le cercle des éditeurs développant sur PlayStation, mais rien qui puisse vraiment faire oublier le charme inaltérable des meilleurs jeux SNIN. Rien qui puisse éroder leur fun. Rien qui puisse égaler leur formidable durée de vie. Et maintenant, didiou, je sais pas pour vous mais moi j'ai une bonne grosse envie de me racheter une SNIN. Et sur le champ en plus. Certains crieront peut-être à l'hérésie : les vieux jeux sont toujours en réalité moins bons que le reluisant souvenir qu'on en a, diront-ils. Eh bien j'ai tenu à les faire mentir en rejouant à quelques-unes de ces soi-disant antiquités. Et putain, le plaisir que j'y ai pris vaut bien tous les jeux 32 et 64 bits du monde. Enfin, peut-être pas, mais pas loin quand même. Goemon Ganbarre 1 Voyez les deux premiers Goemon Ganbarre (91 et 93). Des jeux-cultes où deux pseudo-samouraï déjantés traversent un Japon moyenâgeux à l'ambiance unique, tantôt étrange et troublante, tantôt loufoque et hilarante. D'authentiques bizarreries où se succèdent spectres, villageois niais, pieuvres géantes, ennemis déguisés en lapins, paysages enchanteurs et créatures folkloriques. Deux jeux de plates-formes/RPG auxquels on peut s'essayer à deux simultanément, et bourrés de mini-jeux (shoot'em'up, casse-brique, courses hippiques ou en mode 7, quizz portant sur des éléments du jeu…) dont la durée de vie excède même celle du soft proprement dit à force d'acharnement ! Irrésistible. Voyez Super Probotector (92). Un jeu de plates-formes/action au rythme frénétique où chaque minute est un indicible bonheur, surtout à deux joueurs simultanément. Les motos volantes, les niveaux en mode 7, l'hélicoptère qui lance des missiles auxquels on s'accroche en canardant tout ce qui bouge, l'avion qui bombarde le sol en un zoom admirablement géré, toutes ces séquences monumentales dessinaient alors le nouveau visage des jeux d'action. Un chef-d'oeuvre total. Rock 'n'Roll Racing Voyez Rock'n'Roll Racing (93). Un jeu de course jouissif en 3D isométrique qui insufflait au genre l'originalité, le fun et l'ambiance qui lui manquaient tant depuis l'inégalable Mario Kart (92). Soutenue par une bande-son on ne peut plus appropriée (cinq énormes classiques du rock, parmi lesquels Born to be wild), l'action du jeu donnait la part belle aux missiles dans le cul, aux mines vicieusement placées, aux taches d'huile traîtresses et autres joyeusetés perfides. D'un graphisme pourtant daté, ce jeu dégage aujourd'hui encore un fun littéralement orgasmique, et une fois le paddle en mains on peine à s'en détacher. Voyez Yoshi's Island (95). La référence absolue du jeu de plates-formes, issue de quatre années de gestation, et dont les 48 niveaux comportent à eux seuls, et sans exagérer, davantage d'idées de gameplay que tous les jeux de plates-formes de l'histoire réunis. L'humour, la densité et l'inventivité formelle de Yoshi's island en font le plus grand chef-d'œuvre de Miyamoto, un jeu aux qualités miraculeuses, quasiment insurpassables, qui constitue une source d'inspiration inextinguible pour les années à venir. La variété, la singularité de ces jeux, on ne les retrouverait plus jamais ensuite. Raison suffisante pour les (re)découvrir. SUPER NINTENDO : LES CHIFFRES 42 millions de consoles vendues dans le monde 360 millions de jeux Article écrit par Pierre Gaultier. La première version de cet article est parue dans le N°0 du fanzine Polygon (avril 1999). Depuis, votre serviteur s'est racheté une SNIN avec 10 jeux, et il est bien content. Vous voulez réagir à cet article ? Contactez-nous : vos critiques, vos apports, vos réflexions nous intéressent au plus haut point ! Précisez le nom de l'article dans le titre de votre mail. |