Edito

Le courrier

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A Polygon, on est fiers de nos lecteurs ! Non seulement ils nous écrivent des lettres bien longues, mais en plus elles sont passionnantes (on se croirait dans le courrier de Edge). Avec des lecteurs de cette trempe, on se demande même à quoi on sert. Bref continuez ainsi, amis internautes, car vos missives écrites de main de maître nous ont fait chaud au coeur. Mille fois merci !

 

Bonjour,

Tout d'abord, félicitations pour votre fanzine. J'ai beau ne pas passer énormément de temps sur les jeux vidéo, les souvenirs que m'ont laissés quelques jeux (pour ne citer que ceux-là : Alone in the Dark, Monkey Island II, Sim City, et d'autres bien plus bêtes mais tout aussi divertissants sur Atari 2600) suffisent à consacrer cet univers à mes yeux.

Bref, donc, je voulais réagir à propos d'une phrase de l'article "Le passé a-t-il un avenir ?". Je cite Pierre Gaultier : "Les jeux les plus vulnérables aux années sont ceux dont l'attrait repose surtout sur leur habillage -en gros, les jeux de rôle et d'aventure". Je pense que ceci n'est vrai que si ledit habillage repose lui-même sur la technique du moment où le jeu est créé. On ne compte plus le nombre de jeux particulièrement barbants qui, à l'époque des toutes premières consoles utilisant le CD-ROM, reposaient entièrement sur l'utilisation de la vidéo (par exemple Night Trap). A leur sortie, leur seul intérêt était l'utilisation totalement nouvelle de la vidéo. Autant dire qu'aujourd'hui, ils n'ont strictement plus aucun intérêt.

Polygon : C'est précisément le type de jeux auquel vous faites allusion que nous visions dans cette phrase. Mais vous faites bien de nuancer nos propos, qui étaient, il est vrai, vagues et ambigus.

Cela m'amène à la considération suivante : il n'est pas dans l'intérêt des jeux d'essayer de représenter au mieux la réalité (à moins peut-être d'y arriver, mais on a le temps). Finalement, est-ce qu'on n'est pas, encore aujourd'hui, plus fasciné dans le monde totalement étranger de Doom que dans celui totalement aseptisé d'un Quake 3 aux textures merveilleusement lissées et éclairées ? Les meilleurs jeux, on le voit bien avec les jeux de société, sont ceux qui font le plus appel aux symboles, aux représentations ultra-simplifiées du réel. A la limite, le gros pixel visible n'est pas plus gênant que le déplacement pas à pas sur les grosses cases d'un plateau de Monopoly (comme le dit un copain voué corps et âme à ID Software : quand on joue à Doom, on est certain que chaque pixel des textures et des sprites a été pensé, et qu'un être humain a cliqué dessus).

Monkey Island 2

Pour revenir au cas des jeux de rôle et d'aventure, que dire des Alone in the Dark, Little Big Adventure, et de la série des jeux Lucas Arts (Monkey Island, Indiana Jones, Full Throttle...) ? Ne sont-ils pas toujours aussi attrayants ? N'est-ce pas précisément parce que leurs décors peints se rendent intemporels (en tant que dessins), contrairement à des images de synthèse rapidement dépassées, ou à des photos que l'on trouvera un jour mal compressées ? Je ne parle pas non plus de Flashback. La 2D est une représentation totalement grossière du réel. Mais ça marche, parce que notre imaginaire est bien plus efficace qu'une carte 3D. Le décor dessiné plante le décor, le genre plate-forme/aventure donne son attrait interactif au jeu, et notre cerveau fait le lien, en situant mentalement l'action dans le monde représenté.

Polygon : Nous n'avons rien à ajouter à ces propos extrêmement pertinents. Euh, ça vous dirait d'écrire à Polygon on line ?

Allez, je ne vais pas m'éterniser, mais dernière considération : la mode est au multi-joueurs. C'est vrai : c'est très amusant, bien plus que de combattre une intelligence artificielle. Mais les éditeurs se fient tellement à l'attrait du multi-joueurs qu'ils ne voient plus la nécessité d'investir dans autre chose qu'un moteur 3D. Les joueurs font le jeu, on leur fournit juste le terrain. C'est un terrible retour au loisir le plus basique, celui que l'on fabrique sans rien. Plus de règles intéressantes, plus que le jeu du gendarme et du voleur dans un terrain vague. Il vaut mieux faire du paintball. Le dernier bon doom-like que j'ai vu est Unreal. Parce que l'univers est très travaillé, que l'on a un but, bref, qu'il y a une magie. J'y ai joué des heures. Et pas en multi-joueurs. Et je me suis fait peur, par moments. Bref, pour faire l'analogie avec le cinéma, "Les Ailes du Courage", un film IMAX 3D, est un bon film parce que même projeté dans une salle normale, il resterait un bon film.

Bonnes fêtes de fin d'année,

Ambroise Confetti

Polygon : Absolument. Ceux qui annoncent la fin du jeu en solo sont complètement à côté de la plaque : jeu en solo et jeu en multi-joueurs procurent des plaisirs très différents. Par exemple, hormis leur mode de représentation, Half-Life et Quake 3 n'ont rien en commun. Le génie d'Half-Life réside dans la crédibilité et la densité de son univers, et dans les réactions complexes et parfois inattendues des personnages rencontrés (la conjonction de l'architecture, de l'intelligence artificielle et de la mise en scène peut donner lieu à une variété incroyable d'événements, surtout lorsqu'on est plongé au coeur d'un affontement entre marines et aliens). Les qualités de Quake 3 tiennent surtout à la simplicité de son principe, à son extrême rapidité et au plaisir immédiat et primaire qu'il procure (se blaster entre potes).

Quake 3

Half-Life propose une expérience infiniment plus subtile et profonde que Quake 3 (atmosphère, scénario et rythme remarquablement pensés, potentialités stratégiques étendues, très large palette de lieux et de situations). Cette comparaison fait bien voir une chose : le jeu en solo demeure sans conteste la forme essentielle des jeux vidéo, celle où s'expriment de la manière la plus complète toutes les possibilités du médium. Bref, la mort du jeu solo n'est pas à l'ordre du jour -fort heureusement.

 

Bonjour,

Je tiens tout d'abord à vous féliciter pour la qualité de ce fanzine online. Mais nos points de vue sur la définition des jeux de rôles divergent. Pour moi, Final Fantasy est à la frontière de 2 genres : l'aventure et le jeu de rôle ; du fait de sa linéarité agaçante, d'un background développé et d'une histoire travaillée. Je pense que les vrais jeux de rôles ne se trouvent que sur support PC (enfin à ce que j'en sais).

Polygon : Vous avez certainement raison, mais la définition d'un jeu de rôle vidéo-ludique est forcément difficile à cerner : le genre comporte un nombre pléthorique de branches (action RPG, tactical RPG, field RPG, RPG console, RPG PC...). Si vous considérez qu'un RPG est un jeu qui tente de reprendre scrupuleusement les règles d'un RPG papier, alors, effectivement, le PC est le support roi. Bah, de toute façon, fondamentalement, un RPG pixélisé ne fonctionne jamais comme un vrai RPG.

Ces dernières années, Interplay a fait revivre le jeu de rôle grâce au sublimissime Fallout qui est pour moi le jeu vidéo le plus réussi auquel j'ai joué. Son seul défaut serait peut être un scénario quelque peu anodin par moment.

Fallout 2

Mais par la suite, Baldur's Gate 1&2 ont apporté un background conséquent et Planescape Torment grâce à un scénario qu'on sent puisé de toute la culture vidéoludique-judéochrétienne-anime-Tolkien.... nous fait vivre une histoire captivante sans que l'on se sente emprisonné par l'auteur à aucun moment. Je trouve quelque peu anormal que vous ne fassiez pas état de ces véritables chefs-d'oeuvre vidéo-ludiques qui (ce n'est pas une surprise) sortent des mêmes studios (Black Isle et Bioware) dans vos articles ou dossiers où vous faites de nombreuses références à des jeux de rôle.

Je vous souhaite une bonne continuation et de joyeuses fêtes.

Draikin

Polygon : Nous nous excusons pour ces quelques omissions impardonnables. Nous cherchons à nous mettre à Fallout, Baldur's Gate et Planescape Torment, mais par manque de temps, de sous et de motivation (élevés par Square, nous avons toujours été davantage attirés par les RPG consoles qui flashouillent), nous n'y arrivons pas. Bref pardon pardon pour notre inculture. Merci beaucoup pour votre apport, et si vous avez d'autres remarques à nous faire, n'hésitez pas : nous ne sommes, bien sûr, pas parfaits. Même si on y travaille :)

 

Bonjour à toute l'équipe,

Je suis étonné, oui étonné voire bluffé par l'extraordinaire complexité de ce site. C'est absolument effarant de voir que l'on passe à travers des questions existentielles sur les jeux vidéo d'hier et d'aujourd'hui. Le contenu de Polygon Online est fantastique tout simplement. Etant un joueur de 19 ans passionné des nouvelles technologies et bien sûr des jeux vidéo, ce fut un véritable plaisir que de passer du temps sur votre site. J'ai créé http://www.chez.com/shenmue2 (qui a été, à l'instar de votre site, élu site de la semaine sur jeuxvideo.com et a reçu la note de 3 étoiles). Je crois réellement que Shenmue peut donner lieu à une réflexion précise et passionnante. Voilà, je vous souhaite une bonne continuation et encore bravo.

Régis Monterrin

Polygon : Merci merci merci. Merci. Tant de compliments, c'est presque trop. Vous avez besoin d'argent ? :)

Plus sérieusement, nous envisageons de créer une religion en notre honneur. Nos fidèles se rassembleraient dans une grande salle où ils déposeraient des jeux et consoles par milliers pour satisfaire leurs Dieux. Ce serait bien cool, et puis ça changerait des sacrifices d'animaux, hein !

Non, sérieux, votre site est intéressant -notamment le portrait de ce pionnier génial qu'est Yu Suzuki-, et nous le recommandons à tous nos lecteurs. D'ailleurs, si certains d'entre vous ont un site sur les jeux vidéo à nous faire découvrir, n'hésitez pas !

 

Jeu vidéo = art

« Créer un univers où vivre une expérience totale : le but ultime du jeu vidéo en tant qu'art ». Tout simplement. Polygon est un fanzine sur les jeux vidéo, sorte d'équivalent des Cahiers du cinéma qui tente de nous convaincre, nous les gros réacs pour qui les jeux vidéo ne sont qu'abêtissants et ruinent notre belle jeunesse, que Doom est une oeuvre d'art. À bien y réfléchir, on se souvient de quelques jeux à l'univers hautement poétique (ainsi Millenium 2.2, sur Atari ST, a fait couler quelques larmes d'émotion) ayant jalonné les années 80/90. On ne pouvait pas, ici, ne pas saluer l'initiative : de la réflexion, et de la vraie, sur un sujet quasiment banni d'office des discussions intellectuelles. On adore.

Yahoo ! France - Sélection de la semaine du 27 décembre au 2 janvier

Polygon : Excusez-nous pour cette petite note finale d'auto-congratulation, mais cela fait quand même très plaisir de voir que des gens comprennent et apprécient ce que nous voulons faire passer. Bref, merci Yahoo, merci JeuxVideo.com, et encore merci (tout plein de mercis) à vous, internautes, qui nous manifestez votre intérêt avec tant d'esprit et de gentillesse. Nous ne serions rien sans vous ! Nous attendons avec impatience vos nouvelles missives, see you soon !

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Archives

Le courrier - Deuxième Edition
IGN.com, Zelda : Majora's Mask, Olivier Séguret, Le piratage : un facteur du succès de la PS ?, Comment faire des jeux vidéo son métier, Une salle de repos dans Polygon

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


"Il n'est pas dans l'intérêt des jeux d'essayer de représenter au mieux la réalité"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


"Le jeu en solo demeure sans conteste la forme essentielle des jeux vidéo, celle où s'expriment de la manière la plus complète toutes les possibilités du médium"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


"Planescape Torment grâce à un scénario qu'on sent puisé de toute la culture vidéoludique-
judéo-
chrétienne-
anime-
Tolkien.... nous fait vivre une histoire captivante sans que l'on se sente emprisonné par l'auteur à aucun moment"